De la poussière qui s’assume

Nous ne sommes que de la poussière d’étoile. Ce n’est pas une licence poétique mais un fait. Malgré toutes nos préoccupations concrètes (se lever pour aller au travail, décider ce qu’on va cuisiner ce soir) et abstraites (réfléchir à ce qu’il y a après la mort par exemple), nous ne sommes rien d’autre que de la poussière agglutinée et organisée selon ses propres lois.

Comme tout ce qui se trouve sur la planète Terre, nous sommes constitués d’atomes. Un atome est un énorme noyau composé de protons et neutrons autour duquel gravite un ou plusieurs petits électrons. C’est le nombre de protons que contient le noyau d’un atome qui nous permet de différencier deux types d’atome. Ainsi l’hydrogène est l’atome dont le noyau ne comprend qu’un seul proton. Si le noyau d’un atome compte deux protons il s’agit alors d’un atome d’hélium, et ainsi de suite. On dénombre actuellement 118 types d’atome différent.

Le nombre de neutrons et d’électrons sont généralement équivalents au nombre de protons. Par conséquent, plus un atome contient de protons, plus il contient de neutrons et d’électron. Et, en toute logique, plus il est lourd.

A l’époque des premières étoiles notre planète n’existait pas encore. Seuls des atomes légers, essentiellement de l’hydrogène et de l’hélium, occupaient l’espace et constituaient ces-dites étoiles. C’est au sein de ces immenses forges que les atomes légers ont fusionné pour former des atomes lourds. Après avoir consommé une grosse partie de leur stock de combustibles, ces premières étoiles ont explosé en supernovae. Les atomes lourds ont alors été projetés dans l’univers. Ces atomes sont ce qu’on appelle la « poussière d’étoile ».

D’autres étoiles se sont formées, agrégeant autour de leur orbite des nuages de poussière de leurs ancêtres. Ces atomes lourds se sont condensés en des molécules, des roches, des météorites puis des astéroïdes. Puis ces rochers célestes se sont eux-mêmes percutés jusqu’à former des planètes.

La Terre est donc bien un immense amas de poussière d’étoiles. Ces atomes et molécules ont ensuite enchaîné les réactions chimiques grâce au rayonnement solaire apportant constamment de l’énergie sur la planète. Ces réactions ont donné des molécules de plus en plus complexes. Certaines de ces molécules formant des cellules puis des organismes pluricellulaires dont nous faisons partie. Tout ceci à partir de la même base : de la poussière stellaire.

L’humain n’est donc que poussière. Mais il est de la poussière avec un nombril. Et deux yeux pour le contempler. De la poussière mégalo qui oublie que les 300 000 ans qui le sépare de l’apparition de son espèce ne représentent rien en comparaison de la durée d’existence des atomes dont il est fait. Au point d’avoir pu penser être la création privilégiée d’un être tout puissant. Au point de croire, encore aujourd’hui, être capable de s’émanciper des contraintes de la nature.

Mais tu n’es qu’une des formes que la poussière a prise par l’effet que chacun de ses grains exerce sur les autres. Tu es un amas de poussière qui pense être un corps indivisible et distinct de ce qui l’entoure. Une masse d’atomes organisée pour garder le souvenir de ses interactions avec le monde. Qui capte différentes ondes lumineuses émises par un écran lui aussi fait de poussières. Ces ondes dessinant des signes sur ta rétine qui, assemblés entre eux, forment un texte intelligible pour toi.

Souviens-toi que tu es né poussière et que tu redeviendras poussière. Notre existence est provisoire. Aujourd’hui la poussière qui te compose est unie et déjà par la transpiration, la respiration, la défécation et l’urine plusieurs de nos grains s’échappent de notre enveloppe corporelle. Un jour, l’arrêt des fonctions vitales de notre organisme signera la désunion et l’effritement de la poussière que nous sommes. Chaque atome allant mener son existence sous une autre forme. Preuve par mille que nos divagations sont sans importance aucune à l’échelle de l’univers.

Nous sommes des combinaisons complexes et éphémères de particules simples et éternelles.

Ni créature privilégiée d’un dieu tout-puissant sujette au moindre de ses caprices. Ni aboutissement de la logique de la nature mais capable de s’extraire de ses lois pour la plier à ses désirs. Ni victimes, ni bourreaux, à part de notre forme particulière d’existence.

La liberté est un fantasme. Mais le déterminisme le plus total et amoral a produit des êtres capables de s’interroger sur leurs origines et leur devenir.

Par conséquent le système dans lequel nous vivons n’est pas un choix. Il est une étape éphémère du développement de la matière sous forme humaine. Il n’aura existé que dans un coin paumé de l’univers et pour un temps pathétiquement ridicule.
Investir, vendre, acheter, consommer, la mode, la musique et la science ne sont que des divagations de poussière d’étoiles entre les bornes qu’elle se fixe. Présentement c’est le capitalisme qui court vers son renversement. RIP.